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samedi 22 septembre 2007

Hokkaido Tour : Rishiri et Rebun (9)

Sommaire

J13 (Rishiri) J14 (Rishiri - Rebun) J15 (Rebun)


Jour 13 (20 sept) : Wakkanai 稚内 – 利尻 Rishiri (10 km)





A l'ouest de Wakkanai, entre la mer du Japon et le détroit de Pérouse, se trouvent 2 petites îles au nom de Rishiri 利尻 et Rebun 礼文. Avant de partir, je m'étais rendu compte que c'était des places à voir et j'avais noté les horaires des ferrys au cas où. Ces îles étant assez différentes et très souvent dans le brouillard, j'avais pas réfléchi à laquelle j'irais ou pas. Mais finalement, j'ai déjà fait un bon bout de ma boucle et on est que le 20. Ayant jusqu'à la fin du mois, je décide de prendre le ferry pour Rishiri, la plus grande et la plus haute des 2, et je finirai par aller aussi à Rebun, pour un total de 3 jours.



ノシャップ岬, cap Noshappu. On distingue une silhouette fujiesque au loin ...



La gare JR de Wakkanai, la plus septentrionale au monde


La racine de la jettée du port. Encore occupée par des bikers qui se lèvent tard


Je me réveille donc à quelques kilomètres de Wakkanai 稚内 pour un jour presque beau, en tous cas pas aussi moche que la météo l'indiquait. J'ai loupé le premier ferry, mais je peux prendre le second à 7h50. Je décide de me trimballer mon vélo, ça revient pas trop cher avec la réduc étudiante. Le ferry est un modèle intermédiaire entre celui de Miyajima et celui pour venir du Kansai à Hokkaido, un peu pourri mais avec des couchettes communes et TV. Je suis sur les sièges dehors quand je me fais aborder par une bande de papys qui voyagent seuls en groupe. Ils laissent leur femme à la maison et s'inscrivent au voyage organisé, où ils forment une bande de papys pour boire et se raconter des blagues toute la journée (enfin boire une bière le matin, après ils sont saouls pour la journée). J'ai encore droit à un discours qui se résume à "c'était mieux avant", maintenant les jeunes n'ont plus aucune motivation, ils sont gâtés, font des prêts très tôt, ils soutiennent pas l'économie du pays tout ça … Sûrement qu'ils paniquent aussi, maintenant que y'a plus de vieux que d'actifs ils se rendent compte que ça pose un problème pour avoir leur retraite. Pour l'histoire de voyager seul, on sait bien qu'un couple de japonais ça se voit 3-4 fois avant le mariage, et ensuite ça se voit 0 fois car le mari est toujours au boulot. A la retraite, ils vivent ensemble pour la première fois et se rendent compte de qui est leur conjoint. Ca donne des gens qui dorment dans 2 chambres différentes ou qui divorcent à 70 ans. Bon ils sont pas tous pareils, mais c'est quand même un phénomène de société pas anodin. Il y a un autre étranger sur le ferry, qui d'une part s'avère être français, mais en plus prof de français à Kyoto et Kyoto University !





Puis je monte d'un étage et je suis surpris, on est déjà presque arrivé ! La montagne se dresse fièrement devant notre petit bateau, le ciel et la mer sont éclatants, il fait beau, tout s'annonce bien mieux que quelques heures plus tôt. Du coup, ça me donne envie de grimper en haut.




利尻富士


Le port



L'atmosphère me rappelle celle d'Oshima, une île de quelques milliers d'habitants, des petites rues et petits magasins rétro, pas d'agitation. Il y a quand même 1 conbini dans le village principal, 鴛泊 (Oshidomari), avec des produits jusqu'à 100 yen plus cher que le continent, surtout pour les bento. Je m'en prends un et pars vers la montagne. Il est déjà 10h du matin, et un policier m'avertit que c'est impossible d'aller en haut car la montée prend déjà 7 heures.




On sait bien sûr qu'un Japonais ne tentera rien s'il n'est pas sûr à 100% de réussir ou au moins de ne pas se retrouver dans le moindre trouble, ce qui pousse tous les gens à dire impossible, trop loin, pas le temps, trop d'ours, j'en sais rien, etc.

Il faut alors remplir un formulaire en bas en décrivant ses habits, et c'est parti. Il est 11h. Il me reste donc 6 heures jusqu'à 17h, et les affiches recommandent 11 heures pour aller au sommet. Alors je pars en trottinant …


Au pied de la montagne, il y a une source d'eau potable
"A partir de là, il n'y a plus de point d'eau. Pensez à faire des réserves suffisantes"


Au début, c'est du sous-bois glissant.






Puis ça passe en petit chemin creusé dans le sol et les buissons, où je me tape toutes les branches et toiles d'araignées.



On distingue au loin Rebun, prise dans les nuages


Le port où j'ai débarqué


Pour protéger la montagne, Rishiri est équipée de 携帯トイレ, des toilettes portables. Il faut acheter un sac à 400 yens en bas, et chaque tronçon de la montée fournit le reste :



Ascension du 利尻冨士 Rishiri-fuji


A mi-chemin ça redescend un peu, avant d'attaquer le final. A ce moment je rentre dans le brouillard et on y voit plus rien.





Au 8ème anneau, il y a un petit refuge


Enfin on voit le sommet, qui était caché depuis le début par les premières côtes et le brouillard


礼文, Rebun




Les derniers mètres sont raides et glissants, de temps en temps les cordes fixées sur les bords sont pratiques.






Au sommet, il ne fait pas trop froid. La vue est belle et y'a quelques petites rafales. Je mange mon bento à l'abri de l'autel pendant qu'un mulot vient me rendre visite, comme quoi y'a quand même de la vie dans cet univers volcanique désolé.

利尻冨士, 1718 mètres (le sommet a en fait 2 pics, le plus grand à 1721m n'est pas accessible)


Ascension du 利尻冨士 Rishiri-fuji





Toujours Rebun




Petit à petit les nuages envahissent le sommet et on ne voit plus grand-chose. La redescente est comme d'habitude chiante, mais je tiens un rythme égal à la moitié du temps japonais, et donc je suis de retour pile à 17h. Leur histoire des 11 heures est bien vulgaire, c'est bien allé en 3 (montée) + 1 (pause) + 2 (descente) = 6 heures.


Je récupère mon vélo et pars à la recherche d'un resto. Il n'y a finalement que celui recommandé par le guide, un restaurant un peu spécial où les clients s'assoient autour d'une même table, et on commande le menu "Je laisse le chef choisir" à 1500 yen. Il prépare des trucs plutôt originaux. Autour de la table, ce sont principalement des grimpeurs. J'apprends que le mont Rishiri, 利尻岳, ou 利尻富士 pour l'identifier au Fuji-san, est apprécié des grimpeurs et en été il y a la queue comme au Fuji-san. L'US army vient aussi faire des entrainements. C'était pas trop crédible vu que dans la journée, j'étais probablement la seule personne à y être allé, mais c'est qu'en fait ils ont tous reporté la montée à cause des prévisions météo de la veille. Pourtant c'est pas tous les jours qu'il fait aussi dégagé.

Le gars à ma gauche connaît toutes les montagnes du Japon et plein de montagnes (et des villes des Alpes) en Europe, mais il n'y est jamais allé. Il a appris des livres par cœur, et m'a récité l'altitude des anneaux du Rishiri-fuji que je venais de faire, mais lui il lui faut 2 jours pour y venir à bout …
Je dois partir pour profiter un peu du seul onsen de l'île, pas trop loin. Il est pas super, pas très propre, le jacuzzi est glissant et on y est ballotté par les jets, mais il se rattrape par sa coin laundry et son campground juste en face.


En face de l'onsen





Jour 14 (21 sept) : Rishiri 利尻 – 礼文 Rebun (80 km)




Je suis réveillé par la pluie dans la nuit. Cette fois les prévisions se sont pas trompées, il fait bien un temps de merde. On est 2 sous un chapiteau à se demander quoi faire. Finalement l'autre restera sa journée à rien faire, et moi je pars faire le tour de Rishiri. La boucle presque circulaire fait 53 km, et on devrait y voir Rishiri-fuji sous toutes ses facettes (avec l'espoir que le brouillard s'envole). Il y a une piste cyclable qui fait une partie du tour. La pluie fine s'intensifie, je suis trempé, mais surtout c'est le vent qui se lève. Ou plutôt je ne suis plus à l'abri de ce vent du sud super fort, et j'avance pas, même en descente. On ne voit rien de la montagne. Les vagues sont violentes tout comme les rafales qui me font faire des écarts en vélo. J'arrive péniblement au sud, où le vent joue peu à peu en ma faveur, et je peux tenir mon guidon comme un wishbone en étant propulsé, mais ça ne dure pas longtemps du tout. Je finis par boucler les interminables 53 km en 4h30, en ayant rien vu de chouette.









Je prends le ferry de 14h15 direction Rebun 礼文, l'île plus au nord de 19 km, plus allongée, qui avait disparu dans la journée à cause des nuages. Le trajet dure un peu moins d'une heure, et je marque mon territoire sur la moquette avec mes habits à sécher, avant que les vieux ne se ruent violemment pour prendre une place qui obéit strictement à la loi d'espacement maximum avec ses voisins. C'est un avantage considérable que de rentrer avec les véhicules pour prendre sa place.




Rebun



La pluie cesse quand je débarque sur Rebun. Je remonte l'île tranquillement, il n'y a des maisons que sur le bord de la seule route. Il y a 2 cornes au nord, je vais faire un tour à celle de droite, 金田ノ岬, Kaneda-no-misaki, avant de m'arrêter à 船泊 Funadomari, la plus grosse bourgade de Rebun. Rebun n'a pas d'onsen, mais comme m'avait dit un campeur sur Rishiri, il y a un petit sento. Il est vraiment petit et pourri, mais ça fait l'affaire. J'y suis avec 2 autres gens dont j'ai repris la conversation inarticulée en vol, dont 1 a été emprisonné en Russie jusqu'à l'âge 20 ans, et ça rigolait pas.


Le ciel se cicatrise



Attention !



♪ あなたのコンビ二 ... ♪


La bande de terre prolongée par une île, c'est la corne ouest, le cap Sukoton



Il y a toujours des corbeaux agressifs partout


Le sento de Funadomari



Après avoir fait sécher mes chaussures, il est 20h20 et je vais tout naturellement au shokudo qu'on m'avait recommandé pour le dîner. Mais c'était déjà fermé. En fait tout est déjà fermé. Il n'y a personne. 3500 habitants (mais de moins en moins) fantômes. Je réussis à trouver un izakaya qui sert des ramen, ça a fait un client au chef.




Jour 15 (22 sept) : Rebun 礼文 – 稚内 Wakkanai (55 km)



A mon réveil, le vent semble déchaîné. Je pars l'affronter mais sous un parfait ciel bleu. Les magasins sont encore fermés, même la boulangerie (c'est un peu comme Louis Vuitton, trouver une boulangerie française au dernier endroit ou on pouvait l'imaginer, c'est normal) est fermée, ça semble pas normal. Je vais donc le ventre vide à スコトン岬, Sukoton-misaki, le cap de la corne de gauche, le plus au nord (mais pas autant que le cap Soya). Il n'y a absolument rien à part le panneau indiquant スコトン岬, une île désormais déserte qui lui fait face, un superbe paysage et un marchand de souvenirs, qui voit passer les meilleurs jours 60 bus. La pointe est vraiment ventée et c'est pas évident de tenir debout.


Voilà qui fait du bien



La boulangerie. Lapin, car les 3 membres de la famille sont de l'année du lapin (les signes japonais sont encore différents des chinois). Plage, ... non en fait c'est pas important du tout



Comme on dit ici, le temps est guéri !



スコトン岬 Sukoton Misaki, le cap Sukoton





トド島, Todojima, île désertée


スコトン岬 Sukoton Misaki, le cap Sukoton

Il n'y personne à part les pêcheurs de konbu 昆布, une algue qu'on fait sécher avant de vendre en souvenir, apparemment celle d'ici sont réputées, mais je suis pas un expert en algues.


Derrière, le mont Rishiri veille


Quand le premier bus arrive, je repars par une autre route qui prend un peu de hauteur. J'aperçois Sakhaline au loin, cette île russe que le ramenyasan de la veille m'avait affirmé n'être visible que 2 ou 3 jours par an, à 100 km au nord ! Alors que depuis le cap Soya, juste à 40 km, on n'y voyait rien.




L'île ayant autrefois brûlé, c'est aujourd'hui comme si elle était chauve. Elle est principalement recouverte de basses herbes, qui dessinent des vagues sur les flancs des collines quand le vent court dedans.





Je fais un écart vers 西上泊, il n'y a qu'un point de vue, mais les couleurs sont super belles.




Rebun island


La caserne militaire la plus au nord


Un Rishiri-fuji sans nuages


Puis je fais la mini-rando jusqu'au sommet de l'île. 礼文岳, Rebun-dake culmine à 490 mètres, on y accède par un petit chemin de 4,5 km à partir de la grande route. Evidemment y'a un bon vent au sommet. Mais la vue est superbe, le bleu de la mer est profond, et Rishiri-fuji se dresse juste en face sans (trop de) nuages.







Panoramas au sommet




Equipement de compétition pour un chemin qui se fait tranquillement en courant.



Le fameux écureuil protégé d'Hokkaido. J'en ai vu pas mal, mais des plus furtifs



Objectif : 500 jours sans accident mortel. Déjà 210 jours


Conduite prudente !


Eux sont un peu en retard. Les 2 panneaux à droite, pour sensibiliser aux incendies





Je visite complètement Rebun en allant au sud, l'endroit est appelé aussi 知床 Shiretoko. La route est minuscule, les maisons ne sont que pour les pêcheurs, avec quelques ryokan.






En attendant de prendre le ferry pour Wakkanai, je monte vers 桃岩展望台, un point de vue sur les hauteurs du port. Ca monte bien plus que ça en a l'air mais le panorama au sommet est complet. On peut distinguer les éoliennes sur la côte d'Hokkaido, et Sakhaline encore mieux.


Une photo sans Rishiri-fuji !



Sur l'horizon, on distingue Sakhaline, la Russie officielle la plus proche du Japon


Comme dans tous les transports, les Japonais du ferry ont leur bière à la main, quelle que soit l'heure. Je regarde le tournoi de sumo a la télé, c'est la première fois que je reste devant aussi longtemps (j'ai pas le choix non plus). Comme le base-ball ou le golf, c'est bien un sport ou le temps d'action est négligeable devant le temps de pause/cérémonies/préparation, bref ça à l'air plus fatiguant de regarder que de participer.



利尻富士 et la lune




En descendant au port de Wakkanai, je sens un truc bizarre, il fait bien plus froid qu'avant. On est en fin d'après-midi mais la ville semble morte, les seuls éclairages proviennent de la dizaine de seico marto qui doivent assurer la grande partie du commerce. Je pars à la recherche du ramen-ya recommandé dont la spécialité est le しじみラーメン, un ramen aux corbiculidaes. Alors que les gens de Rebun paraissaient normaux pour une petite île (qui doit quand même accueillir l'équivalent sa population en touristes en été), ceux du ramen-ya sont assez énervants. Il y a même un faux prof d'anglais qui explique n'importe quoi à ses voisins, et qui du fond de la salle me lance des traductions plus qu'inutiles japenglish du genre "coldo" ou "biggou" quand on me parle en japonais. Je réussis à leur échapper pour aller au campground parc qui surplombe Wakkanai, un endroit super dangereux car infesté d'ours (= on y a vu un ours il y a 2 ans). Le long de la montée, je vois tout d'abord un renard, puis un peu plus loin des cerfs au bord de la route … la suite logique c'est l'ours, mais il ne viendra pas.

Wakkanai by night



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