Gobi (2) - Les ruines du temple Süm Khökh Burd
Il fait déjà super chaud quand je me réveille à 9h. On déjeune nos gâteaux et partons plutôt tard, pour une nouvelle journée de van tale-cul.
Бага газрын чулуу = Baga Gazriin Chuluu, la vallée granitique que l'on quitte
Mais on doit rapidement ressortir du van.
Cette pente est trop raide pour le moteur : il faut décharger ses passagers pour la passer
Aluk nous attend de l'autre coté. Voilà l'effet "densité de population minimale"
Peu après cette côte, on s'arrête déjà pour un premier stop. Il y a 4 gers (= yourtes) cachées derrière des tas de gros cailloux.
On joue au foot pendant que le gamin répare la moto
Le gars au T-shirt des 24h du Mans nous fait entrer dans une des gers bien décorée et super propre. Elle contient quelques petits cadeaux de voyageurs étrangers, comme un drapeau du Canada ou encore les éternels petits koalas des Australiens.
En invités dans la ger
La Joconde est plusieurs
Tous assis en rond autour du poêle central, on se fait servir du yaourt. Frais, mais il passerait mieux avec du sucre …
Yaourt party
Après cette hospitalité du matin, c'est reparti. Notre chauffeur paraît un peu perdu, ou en tous cas moins à l'aise que d'habitude. Il s'arrête à une ger pour demander sa route. Il faut dire que sans carte (comme il n'y a rien dans ce pays, la seule carte envisageable serait une carte d'élévation ou une photo satellite), sans panneaux et sur un terrain tout plat, où les notions de temps et de distance sont négligées, avec pour seuls indices des traces de pneus évasives, c'est pas évident.
Coup de fil surprenant : comment fait-il pour avoir du réseau à cet endroit ?
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Un chevalier-aiguilleur et sa moderne monture près d'un puits
On arrive alors à quelque chose qui semble être une étape. Nous ne sommes qu'à 200 km d'Oulan-Bator, après 1 jour et demi de route. Mais de route qui vaut bien plus que son pesant de kilomètres. Les ruines qui se dressent devant nous, c'est СУМ ХӨХ БҮРД Süm Khökh Burd.
Süm Khökh Burd était un temple construit en pierre, sur une île au milieu d'un petit lac. Déjà que d'être dans le désert de Gobi ne facilite pas la vie, les pierres sont absentes de cette partie du désert, il fallait faire des centaines de kilomètres pour les trouver, lorsque le temple a été construit au 10ème siècle. Il a été rénové en palais il y a 300 ans, puis est retourné à ses ruines.
Le lac Sangiin Dalai Nuur n'est à présent qu'une sorte de marécage. On s'en approche, mais ça ne reste pas franchissable pour des gens qui ne veulent pas de boue sur les genoux.
Süm Khökh Burd derriève un ovoo, tas de pierres shamanique
Süm Khökh Burd est réputé pour le bird watching
Un peu plus loin, il y a un vrai temple, minuscule, mais en état. Le gardien prend une commission au passage et nous montre l'intérieur. Ca n'a rien à voir avec les temples bouddhiques que j'ai pu voir au Japon, en Corée ou en Chine. Ici, les choses paraissent plus vieilles, authentiques humbles. Le script mongol/tibétain doit jouer pour quelque chose …
Le temple voisin
Boîte à prières
Sculpture du montant de la porte
La maison du gardien
Les toilettes
Pendant que le Dalaï Lama trône en photo à l'intérieur du temple, on se prépare une salade de légumes à l'ombre du van.
Puis la route continue dans le désert toujours vert.C'est le désert, pas de risque que les chèvres se mélangent avec le troupeau du voisin
Sur le toit du van, tel un scruteur d'horizon sur un navire transatlantique
Au bout de pas longtemps, on s'arrête net au milieu de la route. C'est la panne tant redoutée … Je redescends du toit pour voir ce qu'il se passe, mais quelque chose d'encore plus terrible arrive : la grosse commission. Un rapide tour de cou me confirme que le plat s'étend à l'infini autour du van, aucune cachette. Il faut pourtant agir vite. Je choppe une bouteille d'eau et part en courant dans une direction perpendiculaire à la piste le plus vite possible.
En bout de course, je me suis suffisamment éloigné pour que le van paraisse tout petit, le critère de sécurité est atteint. C'est un énorme décor pour des toilettes, mais je suis pressé par un troupeau de chèvres arrivant derrière moi, dirigé par un Mongol sur son cheval.
C'est la Mongolie, des immenses espaces vides, mais on est jamais seul. Comme si c'était un village de voisins, étalé sur 1000 km au lieu d'un kilomètre.
De retour au van, la panne n'est en fait qu'une panne d'essence. Sûrement la faute au tableau de bord dont les indicateurs ne font pas bouger les aiguilles. On vide donc 2 bidons jaunes dans le réservoir, et c'est reparti.
On aperçoit alors des maisons en dur, et même plus d'une dizaine accolées ! Ce village/ville est sûrement une capitale de préfecture ou quelque chose comme ça.
Ville droit devant !
C'est tout petit, mais on y trouve le peu dont on a besoin. D'abord, guidés par Aluk, on entre dans une petite bâtisse cachée, c'est une boucherie. Pour $10, on achète 3,5 kg de mouton. On doit s'arranger avec la bouchère pour qu'elle nous enlève le blanc. Car sur les 3,5 kg, plus de la moitié était du gras. Il y en reste encore plein, mais à voir la réaction des Mongols, on dirait qu'en préférant le rouge, c'est comme si on a demandé de la viande – mais que les os.
On continue les achats avec des gâteaux et des bières, puis on va au "resto" manger du vrai manger. Il est 18h, mais ça a le goût d'un déjeuner.
Menu
On commande tous comme le chauffeur, une assiette de pâtes bien remplies, avec de la viande dedans. En plus de ça, des crêpes de gras. Et comme toujours, les repas sont accompagnés de thé. Ils appellent ça le tsai, et ils mettent une bonne dose de sel dedans. Et aussi de lait. En fait, c'est plus du lait salé que du thé, mais ici c'est du thé (recette).
De gauche à droite : pâtes à la viande, tsai, galettes de gras sans viande, galettes de gras avec viande (khuushuur)
Les distractions du désert de Gobi. A un peu plus de 2€ la bouteille de vodka, on ne peut guère se plaindre
On trouve un magasin d'habits. Une salle cachée derrière des murs délabrés, que l'on n'aurait pas trouvée si la porte n'était pas laissée ouverte. Il y a un modèle d'Adidas doré et les dernières Nike. La mode confirme son statut de voyageur le plus rapide et plus complet.
On reprend le van pour s'éloigner de la ville, et après s'être décalé de la piste d'une centaine de mètres, on s'arrête regarder le coucher du soleil.
Gobi sunset
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Dans cette partie du désert, il n'y a absolument pas de bois. Pour faire un feu, les seules choses à bruler sont les bouses de vache et autres déjections en tout genre. Armés de bières Cass, importées de Corée, un pays bien connu pour ses talents de brasseur, on balaye les alentours du van à la collecte de combustibles.
La bière Cass et son équivalent gustatif
Pendant ce temps là, Aluk prends soin de nos 3,5 kg de mouton et de gras. Il coupe la viande en tout petits morceaux, et les enfile dans des bouteilles d'eau en plastique, en les compressant bien. La totalité remplit environ 1,6 bouteille. Puis on les plonge dans notre réserve d'eau potable, à savoir le grand bidon bleu dans le coffre du van. Voilà pour la conservation de la viande.
Gastronomie carnivore
Nous, on a récolté bien 50 kg de … merde. On est fier de notre tas, et on s'installe autour. Mais les bouses prennent feu difficilement. Aluk nous chante une chanson mongole. Les bouses produisent plus de fumée que de chaleur, c'est un peu un échec.
Super trophée
Le ciel étoilé est absolument parfait, je n'ai jamais vu autant d'étoiles. Au milieu du désert, j'ai vraiment l'impression que la terre et plate et recouverte d'un dôme.
Si à ce moment un Grec ancien me montrait ce dessin, il pourrait me convaincre
La voie lactée est un arc de cercle qui joint les 2 bouts de la Terre en maintenant le tapis d'étoiles tendu dans le ciel. On repère Cassiopée, Orion. Il y a quelques étoiles filantes, dont 2 avec une très longue trainée. Si aucun de nous ne parle, le silence assourdissant est magnifique.
Le climat du Gobi est terrible : dans une même journée, l'écart des températures peut atteindre 35 °C. Toujours à plus de 1000 m d'altitude, il peut faire de 40°C le jour à -40°C la nuit. Avril et Septembre sont probablement les mois les plus humains : température T-shirt la journée, on frôle le 0°C la nuit. Alors que les autres rentrent dans leur tente, j'en profite pour passer la nuit à la belle étoile, à l'abri du tas de bouses qui n'aura presque pas brûlé, entouré des tabourets pour me protéger d'éventuels olgoï-khorkhoï, et recouvert de toutes les couvertures possibles.