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dimanche 16 mars 2008

Thaïlande (10) - Die Hard (1)

[16 mars] : Fang National Park – Samakkee Mai (117 km)



Encore une nuit avec les moustiques. Je suis réveillé par les rayons du soleil et les bestioles des sources chaudes qui font "cricri" super fort. Le marchand d'œufs à faire cuire dans l'eau bouillante n'a pas encore ouvert son kiosque, et m'oblige à petit-déjeuner mes mini-bananes … encore.

Un mamachari plus puissant que la voiture de l'inspecteur Gadget


Pour une fois, comme témoin direct des propriétés magiques des sources thermales, mes jambes sont bien dès le début de la journée. Les kilomètres de plat s'enchaînent vite. Je m'arrête pour manger 2 bols de pâtes de riz plates, que 15 baht le bol et super bon.



Un temple bien placé sur celle photo "à la japonaise" (i.e. featuring les fils électriques)


Ban San Ton Du


Kilométrage précis au centimètre … faudrait montrer ça à un prof de chimie


Derniers instants insouciants


Puis, au détour d'un virage, je fais le mauvais choix volontaire de partir à gauche, sur les conseils du Français de la GH de Khun Yuam, pour monter à Mae Salong, un village perché touristique.

Je prends de l'altitude


Les quelques kilomètres suivants vont peser des heures et des litres de sueur. La route n'est qu'un enchaînement de montées raides, à faire uniquement en pousse-vélo, suivie de descentes encore plus raides et dangereuses qui sont tout aussi épuisantes en concentration et gestion des freins.



Les terres sont chauves. On y voit assez loin, y compris la route raide que je vais descendre, ainsi que sa remontée. C'est pas très motivant, mais de toutes façons je vais pas faire demi-tour.




Après 2h30 qui me paraissent durer une journée, je suis enfin à Mae Salong. C'est un petit village chinois. En très bref, ses habitants sont les descendants directs des membres du parti populaire de Chine (qui maintenant n'existe qu'à Taiwan ; la Chine continentale, siège de la RPC, ne reconnaissant que le seul parti communiste chinois (PCC) (et les petits partis que ce dernier dirige)), à qui la Thaïlande a accordé l'asile (suite à leur défaites contre le PCC) dans cette région montagneuse et la naturalisation, en échange de leur aide pour combattre, entre autres, la menace intérieure du parti communiste thaïlandais.
C'est donc plein de caractères chinois. Une maison sur 2 est une maison de thé avec un nom chinois, le thé ayant progressivement remplacé (apparemment pas totalement) les champs de pavot qui jadis entouraient Mae Salong.

Bref, c'est touristique pour se relaxer dans un cadre agréable, mais rien qui justifie vraiment son importance, de mon point de vue.

Entrée de Mae Salong avec les smarties chinois




Chinoiseries


Sortie de Mae Salong, avec ses inévitables transformations touristiques


La traversée du village est bien, la route étroite un peu en pente suit l'arête de la montagne. Je me collationne avec quelques interminables mini-bananes avant de me retrouver sans la descente quasi-mortelle, beaucoup trop raide pour mes freins, et je ne contrôle plus mon vélo. Je suis donc super rapidement tout en bas, partagé entre le sentiment réconfortant d'être toujours en vie et celui moins joyeux d'être face à un nouveau mur de lacets pour sortir de ce trou. C'est un vrai piège à vélos. Après encore de nombreux {pousse-vélo, descente sur les nerfs}, j'arrive à un croisement à Sam Yoek, qui est censé symboliser la fin du calvaire.



Tea 101


Piège à muscles


Sam Yoek


Je refais le plein de mes batteries avec des gâteaux, pour une fois pas trop mauvais, et change mes roquettes de 950 mL d'eau potable. C'est parti encore plus vers le nord. Je surfe sur les arrêtes des montagnes, sachant que je dois passer par Fah Luang. Soudainement les indications disparaissent, mais en demandant une fois mon chemin on me confirme que c'est bien tout droit. Bien que ça n'ait pas l'air rassurant, je persévère environ 4 km sur un chemin bien moisi, jusqu'à ce que j'ai plus l'impression de passer la frontière birmane sur un chemin de contrebande plutôt que d'être sur ma bonne route.


Arête sliding



Où suis-je ?


Les Thaï n'ont jamais vu une carte de leur vie (la mienne étant pourtant bilingue english/thaï) et ils ne semblent pas connaître les villages aux alentours. Je me déclare en perdition à Thoed Thaï (peut-être) et fais demi-tour, puis prends la "bonne route" (selon un local). C'est une espèce de cul de sac sans panneau, qui se finit par une route défoncée. De toute façon je n'ai nulle part où aller. Je longe une rivière sur une route déserte et trouée de partout.

Y'a pas d'autres mots, là, c'est vraiment la looze. Quelque part par


Mes 2 cartes n'ont rien en commun, c'est pas facile de savoir si je serai prochainement dans un village ou pas, mais ce qui semble sûr, la luminosité chutant, c'est que je ne serai pas à Fah Luang. Après environ 2 km de pousse-vélo, pendant lesquels j'observe les zones éventuellement campables, à défaut de petite cabane sur pilotis (pratique pour éviter les serpents et autres mets plus dangereux que comestibles), je tombe finalement sur une route plus grande et en bon état. Je vois une voiture passer, qui fait naître une lueur d'espoir dans la nuit tombante.

18h03


Mais juste là, une descente encore bien dangereuse me renvoie au fond d'un trou. Je suis mentalement prêt à dormir dans des conditions pas des plus chaleureuses, lorsqu'une borne au bord de la route semble indiquer un truc après 3 km. Je vais donc tenter ça, et j'arrive à Samakkee Mai à 18h45, heure limite de visibilité.

Ca ressemble fort à un village, en pente, tout petit, mais avec un attroupement autour d'une lumière. Doté de capacités mentales réduites maintenant au niveau de celles d'un hétérocère, je m'approche à peine de la cabane illuminée qu'un gars me propose d'office un whisky et me dit que ce soir, je dors ici, avant même que je songe à demander. Il s'appelle Ui, 25 ans, saoul avec son whisky thaï imbuvable, et il m'apporte 2 poissons et du riz. Il me dit que Fah Luang sera pour demain, on cause environ 20 minutes avec mes 10 mots de thaï. Je suis donc sur les planches de bois, avec mes 2 poissons que j'aimerais bien manger au lieu de faire des efforts pour se comprendre avec Ui. Autour de nous, une douzaine de Thaïs rigolent et sortent un mot d'anglais de temps en temps quand les gestes se répètent sans succès. Il fait nuit. Finalement, on me retire mon dîner pas encore fini et je pars avec Pont, 24 ans, qui restait sur sa chaise, silencieux, en observateur de la scène sûrement peu habituelle pour le village.


En fait Pont parle anglais bien assez. Il est étudiant en Mechanical Engineering à Chiang Mai, et c'est chez lui que je vais dormir. On dîne chez lui avec sa mère, du riz et une purée de poisson. Il me dit que c'est de la cuisine Akha (à prononcer "Arrha"), du nom de sa tribu. Il y a peu d'information en français (et même en anglais) sur les Akha, une des 6 hilltribes des montagnes thaïlandaises que j'ai déjà abordé avec les Hmong. C'est une ethnie de 500.000 âmes, dont 80.000 en Thaïlande, originaire de Chine (Yunnan) et du Tibet. Pont a fait un site en anglais pour décrire les Akha dont le lien semble mort, mais son site en thaï [aqkaqzaqma] présente photos et vidéos facilement accessibles.


Trois de ses 4 sœurs sont casées au Canada, en GB et en Hollande, c'est plutôt une bonne réussite pour ce qu'on peut faire de ses filles ici … Après une douche bien froide dans une bassine d'eau, retour à l'intérieur de cette maison bien rustique, où il me montre des photos et vidéos de cérémonies (voir post suivant), on joue un peu a Yuri's Revenge sur son PC Windows Vista, et on regarde un bout de Pirates de Caraïbes 3 (en thaï). Il ne manque plus qu'internet, mais qu'il a par son téléphone portable. Il me prépare une chambre séparée, j'ai même un lit. Aujourd'hui, j'avais enlevé mon foulard pour la première fois depuis le coup de soleil sur la nuque que je me suis pris le 1er jour, et ben il est revenu tout de suite. Je m'endors avec en tête mon RDV du lendemain 8h avec Ui pour aller nager dans la rivière.


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